Entre deux rendez-vous, l'actuelle Gouverneur adjointe et candidate Sam Danvers et nous a accordé un entretien de près d'une heure. L'occasion de revenir sur le bilan du mandat écoulé, son programme pour améliorer le système judiciaire et la sécurité, et le regard qu'elle porte sur la liste concurrente.
Aujourd'hui, avons six partis politiques officiellement enregistrés sur l'île. Pourtant, nous avons encore vu lors des dernières élections municipales une seule liste présentée par mairie. Pour ces élections gouvernementales, nous n'avons également que deux listes présentées, dont l'une issue d'un parti venant tout juste d'être créé. Quelle analyse faites-vous, au regard de votre mandat précédent, de l'état de la vie politique sur l'île ?
Sam Danvers: Je trouve ça dommage que les gens ayant un intérêt pour la politique lors d'une élection ne poursuivent pas sur le long terme quand ils n'ont pas les résultats escomptés. Par exemple, j'ai trouvé dommage que la liste RSA [Réinventons San Andreas, ndlr] ne continue pas dans la longueur à être un opposant politique, à discuter et à échanger après avoir perdu les précédentes élections. C'est dommage pour la vie politique et la démocratie. Quand il n'y a que des personnes qui sont d'accord, la démocratie régresse, il faut pouvoir être challengés et repoussés dans ses retranchements. Il faut toujours avoir besoin d'argumenter, voir l'opinion des autres. Je trouve ça assez désolant. Même au niveau de notre parti A.S.A.P, qui est actif depuis plus d'un an, nous trouvons dommage que les partis se fassent pour une élection puis se défassent, et qu'il n'y ait pas de répondant de leur part. Ca me rend un peu triste de voir des gens s'engager uniquement pour une élection.
Avez-vous prévu des choses pour pousser ces partis politiques à s'engager davantage, ou pour favoriser la création de nouveaux partis politiques dans la durée ?
Sam Danvers : Nous avons prévu de faire au moins une table ronde par mois avec tous les partis politiques qui le veulent, y compris des opposants politiques, pour pouvoir échanger des idées et discuter des sujets en cours. Nous voulons garder le pied dans la réalité et se faire challenger, chose qui n'a pas été faite lors du mandat précédent.
Du point de vue de la population, on entend assez souvent des gens nous dire que la politique ne les intéresse pas, que tous les partis se ressemblent et se valent, que tous les candidats se valent aussi. Certains vont même jusqu'à dire qu'à la fin, c'est celui qui est le plus corrompu, celui qui a le plus d'argent ou d'influence qui va l'emporter. Que répondez-vous à ces personnes, et comment souhaitez-vous générer un regain d'intérêt pour la vie politique auprès de la population ?
Sam Danvers : Il n'y a pas de solution miracle. Cela fait un an que notre parti travaille là-dessus, nous voulons du répondant et des opposants politiques, donc nous cherchons toujours des moyens pour intéresser les gens. Cela commence par les petites portes : comment marche une mairie, comment marchent les administrations, etc. Nous voulons pousser les gens à se responsabiliser et à réfléchir sur comment les choses marchent, et leur expliquer qu'ils ont le droit d'avoir une opinion et que cette opinion soit entendue. La loi permet d'ailleurs que tout parti politique puisse être créé sans interférence du Gouvernement.
Par exemple, pendant cette campagne, on explique beaucoup aux gens ce qu'on fait, et on les pousse à être critiques et curieux. Nous n'avons pas de mesures particulières pour aller dans ce sens, si ce n'est mieux communiquer avec eux : plus on communique sur l'action Gouvernementale, plus les gens voient ce qu'on fait, plus ils auront une opinion sur ce qu'il se passe et se sentiront légitimes à s'exprimer. C'est un vase communicant.
Vous avez récemment organisé des portes ouvertes au LSAS. Est-ce que l'intérêt de ces portes ouvertes était justement de faire découvrir l'envers du décor et d'intéresser les gens à ce qu'il se passe derrière les portes de ce grand bâtiment ?
Sam Danvers: C'est ça. On veut rendre un peu d'humanité à cette politique. Quand on est Gouverneur, la charge de travail est énorme, mais on veut que les gens puissent communiquer avec nous. Les portes ouvertes sont un moyen de communiquer, et nous avons eu plus d'une trentaine de personnes qui sont venues s'intéresser au bâtiment, rester discuter avec nous, débattre d'idées. Ca a permis d'échanger avec des points de vue différents. Nous souhaitons renouveler l'expérience une fois par mois, pour que pendant un créneau de deux ou trois heures, tous les citoyens qui le veulent puissent trouver quelqu'un du Gouvernement pour répondre à leurs besoins, pouvoir échanger de vive voix de façon humaine et pas juste via un communiqué.
Pendant cette campagne, vous mettez beaucoup en avant la continuité gouvernementale et la communication. Quel regard portez-vous sur le mandat écoulé ?
Sam Danvers : A notre arrivée, nous avons pris la suite d'un Gouvernement qui avait eu beaucoup de déboires avec la justice, à qui plus personne ne faisait confiance, et qui était même tout simplement absent. Il a fallu redonner confiance aux citoyens, nous avons beaucoup travaillé dans ce sens dès le départ. On ne pouvait pas faire pire [rires].
On estime avoir amélioré les choses, même si nous sommes tout à fait conscientes qu'il reste des choses à améliorer. Notre travail quotidien a beaucoup été fait dans l'ombre et a représenté une charge non négligeable, environ 65% de notre temps, le reste étant de faire des lois ou des réunions. C'est ce travail-là dont je suis particulièrement fière avec Lily et Will [Lily Flores est l'actuelle Conseillère et co-listière A.S.A.P, Will Sigbert est l'actuel Gouverneur, ndlr]. Une partie de ce travail a amélioré la manière dont les choses fonctionnent au Gouvernement, pour pouvoir travailler proprement et pouvoir surtout rendre un Gouvernement bien plus propre que celui que nous avons trouvé en arrivant.
Je suis aussi très fière de notre travail de tous les jours malgré la pression. La situation avec les Ballas mi-juillet en particulier n'a pas été simple à gérer. Nous avons dû prendre des mesures qui n'était pas faciles à prendre, et certaines décisions ont été déchirantes, mais elles étaient nécessaires. On a pu voir l'importance d'avoir un Gouvernement respecté et entendu par les administrations et services publics. Pour pouvoir prendre des décisions aussi graves, avoir le respect et l'attention de tous les services était nécessaire, et je pense que nous avons su l'obtenir.
Après, nous avons pêché au niveau de la communication, c'est la raison pour laquelle nous avons mis l'accent sur cet aspect dans notre programme. Nous avons à coeur de nous améliorer. Par exemple, nous souhaitons dès la première semaine du mandat planifier les dates de toutes les réunions qui auront lieu pendant la durée du mandat. Les rendez-vous seront pris à l'avance, ce qui permettra une communication bien plus fluide et régulière.
Justement, au sujet de la politique de sécurité. Nous avons connu la situation des Ballas que vous venez d'évoquer, puis le mois d'août a été marqué par l'Etat d'Urgence et tout le contexte qu'on lui connait. Aujourd'hui, certaines personnes peuvent avoir l'impression, en lisant les journaux, que ces violences s'intensifient et sont partout, tout le temps. Quel est d'après vous l'état de la sécurité sur l'île, et quelle analyse faites-vous depuis le terrain ?
Sam Danvers : D'abord, j'ai toutes confiance en nos services de police sur leurs compétences, leur dévouement et leur abnégation, tous les jours. On leur fait confiance pour réaliser le travail, et les chefs de service tiennent leurs services de manière à ce que le travail soit fait du mieux possible. Nous savons que l'Etat d'Urgence a été très critiqué, on ne va pas se le cacher. On a eu une mauvaise communication autour de lui, et on n'a pas assez expliqué pourquoi il était renouvelé, alors qu'il y avait de très bonnes raisons. On s'en excuse, et là-dessus, on ne peut que faire mieux.
Dès les premiers jours de l'Etat d'Urgence, on s'est rendu compte que l'outil n'était pas assez bien fait et ne répondait pas à tous les besoins. C'est la raison pour laquelle nous avons eu besoin refaire la loi, ce qui a eu lieu deux semaines plus tard, le temps des différents va-et-vients avec des groupes de paroles, et surtout avec le Bureau du Procureur.
Il faut faire confiance aux services de police, faire confiance aux administrations. Nous n'avons que la sécurité des citoyens en tête, et 99% de nos décisions sont prises pour garder les gens en sécurité. On ne peut pas faire régner un ordre complet sur l'île ou faire en sorte que plus aucun criminel ne commette d'exaction. C'est impossible. Le seul moyen d'être proactif, c'est de laisser les services de police faire leur travail et réfléchir sur des outils judiciaires. Nous devons avoir des moyens de répression qui ne tombent pas dans l'extrême. C'est une balance entre, d'un côté, faire comprendre aux criminels que leurs actes ne peuvent pas rester impunis, et de l'autre, ne pas les diaboliser ou les antagoniser pour éviter que la ville ne se retrouve à feu et à sang et risquer une guerre civile. Ce mélange est très difficile à garder en place. C'est un travail de tous les jours au Gouvernement, d'échanges, de discussions et de compromis, qui est très peu mis en avant.
Nous voulons aussi que la justice soit plus juste a posteriori des actions commises, et notamment avec le fil rouge de notre mandat à venir, via l'introduction des juges et la reforme du Code de Justice.
Vous dites avoir toute confiance dans les Forces de l'Ordre. Mais pendant l'Etat d'Urgence, certains citoyens ont perdu cette confiance. On a eu des situations où des personnes se sentaient délaissées, où les Forces de l'Ordre n'assuraient plus leurs patrouilles près des lieux de travail et demandaient aux citoyens de ne les appeler qu'en cas d'urgence immédiate. Cela a conduit certaines personnes à être prises pour cibles par des groupes criminels alors même que la police venait de leur indiquer qu'ils ne passeraient pas. Comment comptez-vous réparer cette confiance que certains citoyens ont pu perdre envers les Forces de l'Ordre ?
Sam Danvers : C'est une bonne question. On veut le faire de plusieurs manières. D'abord, le fait que l'Etat d'Urgence soit levé nous a permis de donner des directives à notre chef de service du SASP et aux mairies qui doivent les transmettre à leurs chefs de service [LSPD pour la mairie de Los Santos et BCSO pour la mairie de Blaine County, ndlr]. L'objectif de ces directives est de renouer avec les citoyens, en particulier sur leur lieu de travail. Ils doivent retourner sur le terrain et redevenir visibles, pas juste arriver une fois que tout le monde s'est déjà tiré dessus. Le BCSO a déjà recommencé, et cela va se poursuivre avec le LSPD et le SASP.
Malheureusement regagner cette confiance va prendre du temps. Nous voulons aussi forcer les chefs de service à communiquer plus avec les citoyens. Le moyen de communication ne sera pas imposé, mais ils doivent expliquer ce qu'il se passe sur le terrain, les opérations conduites le soir, etc. Ils doivent montrer aux citoyens qu'ils assurent leur sécurité de plusieurs manières, même si parfois les citoyens ne les voient pas.
Je vous propose de passer à un autre sujet, avec les contrôles fiscaux. Les premiers contrôles viennent d'être réalisés et vous souhaitez poursuivre dans cette direction. Qu'est-ce qui a motivé la mise en place de ces contrôles fiscaux ? Y a-t-il eu des soupçons de fraude qui vous ont poussé à les mettre en place ?
Sam Danvers : Des fraudes aux impôts, on en a malheureusement très souvent, notamment des fraudes à l'ISF qui est l'impôt géré par le Gouvernement. Le problème, c'est que nous n'avons pas tous les outils pour être efficaces, et en discutant avec le Bureau du Procureur, nous avons réalisé que le Bureau du Procureur ne réalisait jamais aucune enquête financière. Ni sur les entreprises, ni sur les services publics. Moi, ça m'a fait tiquer. Nous avons estimé qu'il fallait une loi pour faciliter et encadrer les enquêtes financières, et donner les outils au Bureau du Procureur pour les réaliser. La première enquête est sortie cette semaine, et on aimerait qu'il y ait un rythme soutenu pour que toutes les structures soient auditées. L'idée serait d'avoir une vérification de chaque structure au moins une fois par trimestre.
Les administrations utilisent de l'argent public, les citoyens doivent pouvoir s'assurer que l'argent est correctement utilisé, qu'il n'est pas détourné, et que leurs administrations fonctionnent correctement.
Cette politique a-t-elle vocation à cibler uniquement certaines structures comme les administrations et entreprises privées, ou bien allez-vous jusqu'à inclure les auto-entreprises, micro-entreprises et associations ?
Sam Danvers : Toute structure créée et fonctionnant dans notre Etat doit être un jour auditée, de la même façon que toutes les structures doivent fournir une comptabilité, qu'il s'agisse de partis politiques, de syndicats, d'auto-entreprises, etc. Nous demandons au Bureau du Procureur de vérifier que les trésoriers de toutes ces structures aient la trésorerie sur leur compte en banque, que l'argent de ces structures n'ait pas disparu. Puis, on envoie au Bureau du Procureur la comptabilité de ces structures pour vérifier que les fonds sont correctement utilisés.
D'un point de vue de transparence, nous voulons que les administrations fassent rapidement partie des structures contrôlées, pour que les gens puissent se rendre compte de ce qui est fait, et avoir l'assurance que les administrations sont correctement gérées.
Sur le volet judiciaire, vous avez évoqué tout à l'heure l'instauration des juges. L'idée est de compléter le rôle actuel des procureurs et des avocats, avec des conditions assez strictes pour accéder à ce poste au vue de sa sensibilité. Vous proposez la mise en place de 2 juges dont le mandat serait de 3 mois, avec un chevauchement tous les mois et demi pour assurer un roulement. Au sujet des avocats, d'abord, nous avons aujourd'hui certains avocats, notamment des avocats commis d'office, qui doivent encore travailler à l'aciérie ou au BTP. Pourtant les avocats sont ou devraient être au coeur du système judiciaire. Que proposez-vous pour aider les avocats, améliorer leur statut et leur efficacité ?
Sam Danvers : Les sessions au tribunal doivent avoir la présence du Bureau du Procureur et d'un avocat pour la personne poursuivie. Il faut donc une place privilégiée pour les avocats. Nous n'avons pas de projet définitif, mais c'est en cours de réflexion, et toutes les idées sont les bienvenues. Personnellement, je pense qu'une partie des salaires des avocats commis d'office devrait être payée par le Gouvernement ou un fonds gouvernemental, mais qu'en contrepartie ils soient soumis à des restrictions et à des plafonds pour éviter les abus. Je ne peux pas encore dire combien, comment ou quand, nous travaillons tous les jours sur ce projet. Mais c'est quelque chose qui pourrait arriver pour les avocats commis d'office, et aussi pour les clients de ces avocats.
Vous avez déjà identifié des risques liés à l'introduction de juges, et en particulier le risque de corruption contre lequel vous proposez une peine de 140 ans de prison. Au-delà de ce risque, ne craignez-vous pas que l'introduction de juges soit accompagnée de pressions de la part de groupes criminels ? Comment comptez-vous permettre à ces juges d'exercer leurs fonctions en toute sérénité et en toute impartialité ?
Sam Danvers : On va leur donner tous les outils possibles, notamment pour que les criminels puissent se défendre, accéder aux dossiers des enquêtes. Il va falloir travailler sur la notion d'anonymat, par exemple pour éviter qu'en cas de dénonciation, le nom de la personne soit accessible par le groupe criminel concerné. Le Bureau du Procureur terminera son enquête, la partagera avec la partie adverse, puis l'avocat et son client pourront préparer leur défense pour pouvoir la porter devant le juge.
Si la personne accusée a le sentiment d'être maître de sa défense et d'avoir eu la parole, je pense qu'on pourra éliminer beaucoup de mécontentement et de frustration. Maintenant, il y aura forcément un perdant. Parfois ce sera le Bureau du Procureur, et parfois la personne jugée, il y aura forcément du mécontentement. Tout comme actuellement certains criminels sont parfois mécontents de la décision du Bureau du Procureur, ce sera la même chose.
Nous avons aussi inclus dans notre programme une remontée qui nous a été faite pendant notre campagne : pour éviter que les juges soient élus par une Assemblée [des Représentants, ndlr] trop orientée politiquement, nous voulons ajouter d'autres voix, par exemple avoir un tirage au sort parmi le tissu associatif ou les avocats. Avec une plus grande multitude de voix, la nomination d'un juge serait réalisée par un panel de personnes apolitique et désintéressé. L'objectif reste avant tout d'avoir une justice équitable et neutre.
Pourrait-on imaginer, pour la protection des juges, la création d'une circonstance aggravante en cas d'agression d'un juge par un criminel ?
Sam Danvers : Oui. Ce sera la même chose que pour un Procureur ou un Maire. Il y aura un effet cumulatif qui rendra la sanction beaucoup plus lourde en cas d'attaque envers l'Etat. Le juge serait employé par le Gouvernement mais sans lien hiérarchique, pour séparer le système judiciaire et le système exécutif. Ils seront ainsi protégés tout comme n'importe quelle autre administration.
Votre programme mentionne un encadrement des primes et des salaires. Vous avez déjà eu l'occasion d'expliquer que votre objectif était avant tout de clarifier les choses dans la loi, de rendre publiques et d'encadrer par des arrêtés municipaux les grilles salariales appliquées au sein des services publics, et aussi d'éviter que certaines entreprises ne déduisent les salaires des primes. Aujourd'hui, certaines entreprises n'incluent pas clairement les grilles salariales dans leurs contrats de travail, ou sont tout simplement susceptibles de modifier ces grilles à n'importe quel moment sans que ce ne soit encadré. Comment comptez-vous protéger les employés contre une liberté assez importante dont jouissent les patrons d'entreprises privées ?
Sam Danvers : On arrive aux limites de ce que le Gouvernement peut faire. Les patrons ont la liberté de choisir comment ils gèrent leurs entreprises. L'une des actions possibles, c'est soutenir les employés qui voudraient se syndiquer pour faire valoir leurs droits et négocier avec les patrons pour que les grilles soient ajoutées à un règlement, soient écrites noir sur blanc ou ne puissent pas être modifiées. Le Gouvernement ne peut pas faire d'ingérance au sein d'entreprises privées, on peut définir des cadres légaux, on peut définir des termes précis pour limiter les risques que certains patrons fassent n'importe quoi. Mais on ne peut pas imposer à un patron de mettre tel salaire ou tel pourcentage de prime. On peut par contre aider les employés à se structurer pour négocier avec leurs patrons. Nous voulons remettre les syndicats au goût du jour, et permettre aux gens de comprendre le principe et le pouvoir qu'un syndicat peut représenter. Cela permettrait de faciliter les discussions avec les patrons.
Vous dites que le Gouvernement n'a pas vocation à faire de l'ingérance dans les entreprises privées, ce qui est aussi le discours de la liste M.A.A.T par ailleurs, pourtant la loi demande bien que les montants ou pourcentages des primes soient contractualisés par l'employeur. Un employé qui n'aurait pas le montant de sa prime contractualisé ne pourrait donc pas se protéger ?
Sam Danvers : Le patron serait dans l'illégalité. Il doit donner toute la documentation à son employé, le règlement intérieur, les paliers de prime ou de salaires. Tout doit être écrit quelque part, noir sur blanc. En revanche, le patron peut le changer comme il le souhaite. Mais s'il se retrouve face à un syndicat qui le menace de mettre toute sa masse salariale en grève et de mettre le fonctionnement de l'entreprise en pause, il sera forcé de s'asseoir à la table des négociations. Ce sont les syndicats qui doivent jouer ce rôle, et protéger les employés.
Si vous ne deviez garder qu'une seule mesure de votre programme, un axe ou une philosophie, lequel choisiriez-vous ?
Sam Danvers : Le projet d'introduction des juges me tient particulièrement à coeur, cela fait plus d'un mois que j'ai engagé les premiers échanges et rédigé les premiers brouillons de loi. Personnellement, c'est ce que j'aimerais voir aboutir.
Plus globalement, avec Lily, nous voulons surtout nous améliorer, et ça passe surtout par une meilleure communication et de meilleurs échanges.
J'imagine que vous avez pris connaissance du programme de la liste M.A.A.T. Y a-t-il une mesure dans leur programme avec laquelle vous n'êtes pas d'accord ?
Sam Danvers : Ils ont beaucoup d'idées. Mais pour avoir travaillé 3 mois au Gouvernement, je pense que beaucoup de leurs idées sont utopiques. La réalité du terrain et notamment du Gouvernement fait que certaines de leurs propositions ne sont pas applicables. Celle qui m'embête le plus, c'est leur volet judiciaire avec la catégorie d'amendes "en bande organisée" et leur légifération autour de la "politique zéro". Ce qui me pose problème, c'est d'écrire dans la loi que certains groupes criminels seront discriminés par rapport à d'autres, pour la seule raison que la Gouvernement s'en donne le droit. C'est une porte d'entrée un peu trop dangereuse.
Pourtant, on a l'impression que c'est exactement ce qu'il se passe par moments, quand on a justement besoin d'avoir des actions ciblées contre certains groupes.
Sam Danvers : Nous avons utilisé la loi RICO [lutte contre le crime organisé permettant des peines pouvant aller jusqu'à 140 ans de prison, ndlr], qui est une loi fédérale, envers le groupe des Ballas. On a parlé de "politique zéro Ballas", mais la loi fédérale nous permettait cette latitude. Mais lors du dernier Etat d'Urgence, on a eu pas moins de 12 groupes qui se sont tapé dessus. On ne peut pas dire "vous me ciblez ce groupe-ci, et vous oubliez les autres". Ce serait discriminant de cibler un groupe en particulier, de la même manière qu'on ne ferait pas d'enquêtes financières que sur une structure en particulier. La loi doit rester impartiale et neutre, et doit rester applicable à tous. Dès lors que la loi introduit elle-même de la discrimination, elle n'est pas formulée correctement.
La liste M.A.A.T prévoit une série de mesures à destination des micro-entreprises, des auto-entreprises et des associations, leur objectif étant de faciliter la création et la gestion de ces petites structures, en mettant à disposition des gérants une boite à outils, une protection juridique, par exemple en rendant plus contraignantes les contraintes qui autoriseraient le Gouvernement à décider de la fermeture d'une auto-entreprise ou d'une association. Que pensez-vous de ces mesures, êtes-vous d'accord avec cette philosophie, et prenez-vous l'engagement de mettre certaines de ces choses en place ?
Sam Danvers : Pour créer l'une de ces structures, il suffit de remplir un formulaire, et votre entreprise est créée. En termes de facilité, je ne suis pas sûre que l'on puisse faire mieux. Pour ce qui est ce la mise en place de boite à outils, je pense qu'ils ne se rendent pas compte de la charge de travail qui incombe au Gouvernement. Il est irréalisable, ou en tout cas sacrément utopique, de penser que l'on aura le temps de faire ce genre de choses. On fait toute la comptabilité avec Lily, et les gens nous envoient des photos ou des formats complètement différents pour leur comptabilité. On aimerait bien avoir un outil qui leur permette de tout centraliser, faire de l'automatisation, etc. Mais ça demande énormément de temps, et je pense que c'est irréalisable pour le Gouvernement. Après, pourquoi pas missionner une auto-entreprise sur l'île, avec un contrat de services et un contrat de maintenance. On peut en débattre, c'est peut-être faisable. Pour avoir travaillé au Gouvernement avec Lily et Will, on a très bien compris les limites de temps et d'énergie disponible. On pourrait s'engager sur ce genres de choses, mais on ne veut pas faire de promesses en l'air. C'est très pragmatique. Si M.A.A.T réussit à le faire, tant mieux. S'ils arrivent en plus à gérer le Gouvernement au quotidien, chapeau bas. Mais j'ai de gros doutes.
Concernant les fermetures d'entreprises, notre politique est de considérer que la structure continue de vivre tant que la comptabilité est à jour. Mais à partir du moment où on ne reçoit plus de comptabilité une fois ou deux fois de suite, on considère que la structure est inactive, et donc on la ferme. C'est notre politique, et c'est celle que l'on continuera d'avoir pour la suite.
Pour conclure, avez-vous un dernier mot à ajouter ? Quelque chose qui vous semblerait important, une mesure sur laquelle vous souhaiteriez mettre l'accent, etc.
Sam Danvers : Allez voter ! Il est très important de voter, c'est un devoir citoyen. Peu importe que ce soit pour nous ou pour la partie adverse, il faut aller voter. Rendez vous compte que votre voix à un poids, et que vous pouvez l'exprimer, la faire entendre par vos votes. N'hésitez pas à demandes des comptes au Gouvernement, à lui demander de se justifier. Soyez concernés, sentez vous concernés, votre voix et votre avis compte, alors faites le entendre et allez voter.